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Astrophysique: des nuages riches en eau semblent avoir été découverts dans les profondeurs de la Grande Tache Rouge de Jupiter! ____¤201809
Une étude, dont les résultats intitulés «The Gas Composition and Deep Cloud Structure of Jupiter's Great Red Spot» sont publiés dans la revue The Astronomical Journal et disponibles en pdf, laisse penser que des nuages riches en eau ont été découverts dans les profondeurs de la Grande Tache Rouge de Jupiter.
Rappelons tout d'abord que les modèles de formation des géantes gazeuses impliquent qu'elles devraient contenir des quantités importantes d'eau (bien que la valeur exacte soit débattue), «même si Jupiter est constituée au moins à 99 % d'hydrogène et d'hélium»: en effet, les planètes géantes devraient «s'être formées au-delà de la ligne des glaces, encore appelée ligne des neiges, c'est-à-dire la région au-delà de laquelle le rayonnement solaire dans le disque protoplanétaire n'est plus assez intense pour permettre à de l'eau liquide d'exister et qui permet donc à des grains de glaces de se former (y compris de glace carbonique)». D'ailleurs, plusieurs lunes de Jupiter, «nées dans un environnement similaire» sont «riches en glace, et en premier lieu Europe».
Comme jusqu'à présent, «aucune détection convaincante de ces grandes quantités d'eau dans l'atmosphère de Jupiter» n'a été faite, l'étude ici présentée a «mobilisé les instruments de deux observatoires au sommet du mont Mauna Kea à Hawaï, permettant d'observer dans l'infrarouge: le W.M. Keck Observatory avec son Keck 2 (le télescope infrarouge le plus sensible au monde), et bien sûr le célèbre Infrared Telescope Facility (IRTF), un télescope infrarouge de trois mètres de diamètre créé à la fin des années 1970 à l'initiative de la Nasa pour faciliter la préparation des missions spatiales dans le Système solaire».
Dans un premier temps, la recherche s'est focalisée «sur la Grande Tache Rouge, la tempête géante deux fois plus grosse que la Terre», qui «existe depuis au moins 150 ans». Dans cette observation, certaines parties du spectre des émissions infrarouges, détectables dans cette région de la géante, doivent «traverser plusieurs des couches nuageuses prédites par la théorie de l'atmosphère de Jupiter»: en fait, la théorie prédit «une couche inférieure (la plus profonde) constituée de nuages de glace à l'eau et d'eau liquide, une couche intermédiaire constituée de nuages à base d'ammoniac et de soufre et une couche supérieure avec des nuages d'ammoniac».
En réalité, «ces émissions sont un véritable carottage à travers les couches, nous renseignant sur les conditions physico-chimiques dans l'atmosphère de Jupiter via notamment leur absorption partielle par le méthane». Comme le méthane est réparti uniformément, car les couches sont trop chaudes pour qu'il puisse donner des nuages, des variations dans le spectre d'absorption trahissent des couches nuageuses.
Effectivement, l'étude a identifié une couche «à la profondeur où l'on devrait trouver des nuages contenant de l'eau» et, d'après elle, «il est même possible d'en déduire, en conjonction avec d'autres mesures dans l'infrarouge concernant le monoxyde de carbone, que Jupiter contiendrait finalement de deux à neuf fois plus de noyaux d'oxygène que le Soleil». Cette évaluation est consistante «avec les modèles théoriques prévoyant de grandes quantités d'eau dans l'atmosphère de Jupiter (on soupçonne de plus, depuis quelque temps, la présence d'un cœur de roches et de glaces contenant 10 fois la masse de la Terre)».
Comme «la technique utilisée est transposable à toutes les autres régions de la surface de Jupiter» et comme «la sonde Juno dispose de son propre instrument pour collecter des données dans l'infrarouge», on pourrait d'ici peu «avoir des confirmations de la détection des nuages riches en eau de Jupiter et à terme même une carte des abondances de l'eau dans la géante».
Tags : Astrophysique, 2018, The Astronomical Journal, oxygène, Jupiter, nuages, eau, Grande Tache Rouge, lignes de glace, géantes gazeuses, atmosphère
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