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Astrophysique: la présence de deux sources d’eau dans une chondrite prouve que des transferts de matière ont eu lieu dans le système solaire lors de la formation des astéroïdes!____¤201805
Une étude, dont les résultats intitulés «A dual origin for water in carbonaceous asteroids revealed by CM chondrites» ont été publiés dans la revue Nature Astronomy, a permis de mettre en évidence, grâce à la présence de deux sources d’eau dans une chondrite de type CM, que des transferts de matière ont eu lieu dans le système solaire lors de la formation des astéroïdes.
L’hypothèse souvent évoquée de «l’origine de l’eau des océans terrestres et des molécules carbonées, ingrédients indispensables au développement de la vie sur Terre» est «celle d’un apport tardif, après les premières étapes de formation de la Terre, par des petits corps hydratés tels que des comètes ou des astéroïdes». Cependant, il n’existe pas «de consensus sur la nature de ces corps hydratés» et «la répartition de l’eau et des composés organiques dans le système solaire lors de sa formation» est encore mal connu.
Rappelons ici que «la composition de l’eau dans le système solaire au moment de la formation des planètes peut être sondée par l’étude des météorites primitives comme les chondrites carbonées» qui «proviennent d’astéroïdes riches en carbone, qui se sont formés à des températures assez basses pour que l’eau se trouve sous forme de glace et puisse être agglomérée avec les poussières solides».
Plus précisément, la glace, «une fois incorporée aux astéroïdes», a fondu et altéré les poussières «qui l’entourent formant ainsi des minéraux hydratés (argiles) qui enregistrent la signature de la glace d’eau» de sorte qu'en «mesurant la composition des minéraux hydratés des chondrites», on peut «remonter à la composition de la glace d’eau présente au moment de la formation des astéroïdes, dans les premiers millions d’années du système solaire».
Dans l'étude ici présentée, «un type de météorites primitives a été sélectionné, les chondrites carbonées de type CM» qui «sont parmi celles contenant le plus d’eau et sont similaires aux poussières micrométriques tombées sur la Terre tout au long de son histoire». Une sonde ionique «de dernière génération à l’université d’Hokkaido au Japon» a été utilisée pour analyser la composition isotopique de l’hydrogène dans les chondrites.
Du fait que «les minéraux hydratés des chondrites sont très finement mélangés à des composés carbonés contenant de l’hydrogène, il n’est pas possible de mesurer directement leur composition isotopique D/H» (l'hydrogène «possède deux isotopes stables, H et D pour hydrogène et deutérium» qui ont un proton mais «D possède un neutron, ce qui le rend deux fois plus lourd que H» et mène à «un comportement légèrement différent pour H et D dans les processus géologiques et astrophysiques»).
Pour contourner cet obstacle, l'étude a «mesuré en parallèle le rapport D/H et le rapport élémentaire carbone sur hydrogène (C/H)». En effet, «comme les minéraux hydratés ne contiennent pas de carbone et que les composés carbonés sont enrichis en deutérium par rapport aux minéraux, les rapports D/H et C/H varient de façon couplée lorsque les proportions de minéraux hydratés et de composés carbonés changent»: la mesure de ces rapports «dans des zones des chondrites ayant des proportions différentes de composés carbonés et minéraux hydratés» fournit «une droite de mélange dont l’ordonnée à l’origine, pour C/H = 0, indique la composition isotopique D/H des minéraux hydratés».
Il apparaît ainsi «que la composition isotopique D/H de la glace d’eau qui s’est trouvée sur les astéroïdes des chondrites de type CM est 1.5 fois plus faible que le D/H des océans terrestres», ce qui «indique que l’eau s’est formée dans le système solaire interne à la différence de la glace d’eau de la comète 67P/ Churyumov-Gerasimenko visitée récemment par la sonde Rosetta (ESA)».
En fin de compte, parmi les six chondrites analysées, «la météorite Paris montre un comportement particulier»: c'est «la chondrite de type CM qui contient le moins de minéraux hydratés avec des zones qui semblent avoir échappé à l’altération par la glace d’eau fondue».
Comme dans ces zones, «le rapport D/H des minéraux hydratés est plus élevé que dans les zones altérées et dans les autres chondrites CM», on peut en conclure «que la chondrite Paris a conservé la signature de deux sources d’eau différentes : l’eau pauvre en D du système solaire interne et une eau riche en D, probablement formée plus loin dans le Système solaire». Cette présence de deux sources d’eau prouve que des transferts de matière ont eu lieu «dans le système solaire lors de la formation des astéroïdes».
Tags : Astrophysique, chimie, 2018, Nature Astronomy, Système solaire, météorites, astéroïdes, chondrites carbonées, chondrites, hydrogène, deutérium, carbone
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