• Génétique: la suppression d’une petite séquence d’ADN, Enh13, qui régule l’expression du gène Sox9, suffit à provoquer l’apparition d’ovaires chez une souris mâle!____¤201807

     

    Une étude, dont les résultats intitulés «Sex reversal following deletion of a single distal enhancer of Sox9» ont été publiés dans la revue Science, a permis de découvrir que la suppression d’une petite séquence d’ADN, Enh13, qui régule l’expression de Sox9, suffit à bloquer la mise en place des testicules et provoque, en conséquence, l’apparition d’ovaires chez une souris mâle.



    Rappelons tout d'abord que, dans les années 1950, «l’embryologiste français Alfred Jost avait montré que les testicules orchestrent la mise en place de l’ensemble des caractères sexuels masculins en produisant de la testostérone». Par la suite, Robin Lovell-Badge et son équipe ont découvert, dans les années1990, «que les cellules des testicules n’apparaissent qu’en présence d’un signal moléculaire spécifique, codé sur le chromosome Y par un gène nommé SRY».

     

    Plus précisément, ce gène SRY «produit une petite protéine, SRY, qui se fixe à l’ADN et active à son tour l’expression du gène Sox9 situé sur le chromosome 17», qui «code un facteur de transcription, une protéine capable de contrôler l’expression de milliers de gènes qui constitue la 'tour de contrôle' de la mise en place des testicules»: ainsi, chez l’Homme, «70 % des individus mâles porteurs d’un gène Sox9 non fonctionnel possèdent des organes génitaux externes féminins».

     

    Jusqu'ici, «la zone de fixation de la protéine SRY restait mal connue», car «on supposait que la protéine se fixait sur une séquence d’ADN nommée TESCO et, ce faisant, régulait l’expression du gène Sox9, mais «si les différentes expériences d’altération de la séquence TESCO conduisaient bien à une baisse de l’expression de Sox9 chez la souris mâle, aucune inversion sexuelle ne se produisait, l’expression de Sox9 restant suffisante pour déclencher la masculinisation».

     

    L’étude ici présentée, réalisée par l'équipe de Robin Lovell-Badge est donc parti de la supposition «qu’une deuxième séquence régulait l’expression du gène Sox9, de façon complémentaire à TESCO et sur laquelle se fixait également la protéine SRY». Dans un premier temps, «une vaste portion de 2 millions de paires de bases (briques élémentaires de l’ADN) en amont du gène Sox9, contenant a priori la séquence régulatrice recherchée» a été délimitée.

     

    Ensuite, «pour affiner ce ciblage», cette portion a été traitée «avec des enzymes capables de découper les portions d' 'ADN actif'», car lorsqu'une région de l’ADN n’est pas activement 'utilisée' par une cellule, «elle s’enroule, se condense et devient alors inaccessible aux différentes enzymes». Le séquençage des fragments d’ADN actif obtenus, a alors permis d'identifier «33 zones régulatrices potentielles».

     

    Il a été alors recherché «les séquences spécifiques des cellules des testicules qui stimulaient l’expression de Sox9 au moment de la différenciation testiculaire» et il a été constaté que, parmi les 33 séquences, il y en avait une seule qui remplissait le 'cahier des charges'. Dénommé Enh13, ce fragment d’ADN de 500 paires de base contient, en outre, «un site de fixation à la protéine SRY».

     

    Alors que «les chercheurs pensaient que seule une altération conjointe de TESCO et de Enh13 conduirait à une inversion sexuelle chez les souris», les premières expériences d’altération de Enh13 chez ces rongeurs ont montré que «l’altération de Enh13 seule sur les deux chromosomes 17 d’une souris mâle» conduisait «à une très forte diminution de l’expression de Sox9 et à l’apparition d’ovaires».

     

    Ces éléments suggèrent que Enh13 agit «en amont de la séquence TESCO, plus tôt dans la différenciation sexuelle», car «la protéine SRY est produite sur une période très courte, de quelques heures, pendant laquelle elle stimule la production de la protéine Sox9» et, dans cette fenêtre, si sa concentration dépasse un certain seuil, l’expression du gène Sox9 est définitivement maintenue par l’activation d’autres séquences régulatrices du gène». Ainsi, «les chercheurs supposent que Enh13 régule l’expression de Sox9 au début de cette période critique tandis que la séquence TESCO intervient dans la deuxième vague d’activation».

     

    Comme «la séquence Enh13 existe aussi chez notre espèce» et qu'on sait «que dans 50 % des cas d’ambiguïté sexuelle, la partie du génome qui contient cette séquence est altérée», cette étude ouvre «une piste de réflexion intéressante sur les troubles de différenciation sexuelle chez l’homme et les cas de dysfonctionnement testiculaire».

     

     


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