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Océanographie: une large part de la variabilité interannuelle du repeuplement des populations de merlus est due aux changements du climat et de la circulation océanique!____¤201906
Une étude, dont les résultats intitulés «Accounting for ocean connectivity and hydroclimate in fish recruitment fluctuations within transboundary metapopulations» sont publiés dans la revue Ecological Applications, a permis, en utilisant une stratégie innovante, de montrer qu’une large part de la variabilité interannuelle observée dans le repeuplement des populations de merlus durant les 25 dernières années est due aux changements simultanés du climat et de la circulation océanique. Ce travail, qui «ouvre la voie à l'intégration de la complexité des écosystèmes et de l'environnement dans la gestion des pêches», va contribuer «à une gestion plus durable des ressources halieutiques les plus surexploitées, comme le merlu dont le taux de mortalité par pêche est jusqu’à dix fois supérieur à l'optimum en Méditerranée».
Relevons tout d'abord que «les stocks des espèces de poisson commercialisées, dont la plupart sont actuellement surexploités, sont régulièrement évalués de manière indépendante dans des unités de gestion régionales» et qu'avec «d’autres données biologiques et halieutiques, les estimations annuelles du 'recrutement' (le degré de repeuplement de la population adulte par les juvéniles) permettent aux scientifiques d’estimer l’état actuel des stocks et aux gestionnaires de réglementer la pêche dans chaque région».
Cependant, comme, dans le même temps, «les populations marines ont tendance à se répartir de manière hétérogène dans le paysage marin et à réagir de façon non linéaire à la variabilité de l’océan et de l’atmosphère», l’efficacité de la gestion de la pêche est diminuée du fait qu'elle «n'intègre pas ces processus complexes dans l'estimation des stocks».Dans ce contexte, l'étude ici présentée a analysé «les éléments qui affectent la variabilité interannuelle du recrutement, pierre angulaire écologique des sciences halieutiques, dans plusieurs unités de gestion» en s'appuyant «sur les capacités croissantes des modèles de circulation à haute-résolution à simuler la dispersion océanique et sur des travaux antérieurs concernant une population de poissons démersaux (montrant une territorialité par rapport au fond marin sur lequel ils vivent) largement distribuée et exploitée».
Il a ainsi pu être démontré «que les variations du recrutement observées dans chacune des unités de gestion considérées s’expliquaient par la variabilité du climat et des courants océaniques, cette variabilité affectant la dispersion et la survie des premiers stades de vie de l’espèce (œufs et larves)».
Concrètement, «les indicateurs simulés de connectivité (cette dernière étant définie ici comme le transport de larves par les courants marins qui crée des 'liens' entre différentes régions) et un indice hydroclimatique (composition de mesures atmosphériques matérialisant en un indice les interactions entre l’océan et l’atmosphère) synthétisent la plupart des influences environnementales qui affectent les populations de poissons, créant ainsi de nouvelles opportunités pour intégrer les effets environnementaux à la gestion des stocks halieutiques».
L'étude s'est focalisée «sur le merlu européen (Merluccius merluccius) dans le nord-ouest de la Méditerranée, en raison de son importance socio-économique et de son statut avéré d'espèce surexploitée». Une méthodologie innovante a permis de mesurer «la rétention larvaire (confinement) et les échanges de larves entre six sous-populations de trois unités géographiques de gestion (GSA, Geographical sub-area) évaluées de manière indépendante par la Commission générale des pêches de la Méditerranée (CGPM)».
Il a été mis en évidence, «dans chacune des trois régions et au cours des deux dernières décennies», un lien «entre la variabilité interannuelle du recrutement du merlu (estimée à partir de données de pêche) et celles du climat et d’un nouvel indicateur de connectivité, l’autorecrutement larvaire (le rapport entre les larves produites localement, confinées sur zone, et celles des GSA voisines, qui contribuent aussi au repeuplement local)», ce qui «suggère que les processus océanographiques engendrés par l’atmosphère ont des impacts forts et hétérogènes sur le recrutement du merlu». Il en découle, en outre «que les niveaux de recrutement dans ces GSA sont interdépendants et liés à la connectivité larvaire».
En fin de compte, «ces corrélations étroites entre variables simulées et observées suggèrent que le cadre de modélisation et les indicateurs synthétiques développés dans cette étude pourraient être intégrés dans les modèles de population utilisés dans l'évaluation annuelle des stocks». De plus, ces travaux fournissent aussi «des informations pertinentes pour améliorer la délimitation spatiale des zones d’évaluation des stocks halieutiques en vue de mesures d’adaptation».
Tags : Océanographie, 2019, Ecological Applications, climat, circulation océanique, merlus, Méditerranée, atmosphère, océan, poissons, pêche, œufs, larves
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