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Zoologie: le génome des mammifères placentaires actuels porte encore les traces de leur passé insectivore!____¤201806
Une étude, dont les résultats intitulés «Chitinase genes (CHIAs) provide genomic footprints of a post-Cretaceous dietary radiation in placental mammals» sont publiés dans la revue Science Advances, a permis de montrer que le génome des mammifères placentaires actuels porte encore les traces de leur passé insectivore.
Rappelons tout d'abord qu'à «l’époque où les dinosaures régnaient en maîtres sur le monde, les premiers mammifères, apparus à peu près en même temps, vivaient cachés dans leur ombre en grignotant surtout des insectes» comme le prouve l'examen de leurs fossiles «et notamment de la forme de leurs dents».
Comme pour manger des insectes «il peut être utile de posséder des chitinases, des enzymes qui permettent de digérer l’exosquelette riche en chitine caractéristique des arthropodes, dont font partie les insectes», l'étude ici présentée s'est intéressée à «un gène codant une chitinase, le gène CHIA» en analysant «107 espèces de mammifères placentaires (ce qui exclut les marsupiaux et les monotrèmes). Pour ce qui concerne l'homme, on savait déjà qu'il «possède un gène de chitinase fonctionnel et trois pseudogènes CHIA, devenus non fonctionnels par accumulation de mutations au cours de l’évolution».
L'étude a ainsi découvert cinq gènes CHIA dans le génome de ces mammifères placentaires. Plus précisément, «les espèces qui sont insectivores, comme les tarsiers, l’oryctérope et certains tatous, possèdent cinq gènes fonctionnels» tandis que «chez les espèces carnivores et les herbivores, la plupart de ces gènes sont devenus des pseudogènes non fonctionnels» représentant «des sortes de fossiles moléculaires témoins de leur fonction passée».
De plus, l'étude a «mis en évidence une corrélation entre le nombre de gènes de chitinase fonctionnels dans le génome et le pourcentage d’invertébrés dans le régime alimentaire des espèces actuelles de placentaires». On peut en déduire «que les premiers mammifères placentaires possédaient cinq gènes de chitinase fonctionnels» et qu’ils étaient probablement insectivores, ce qui montre que la génomique corrobore les résultats de la paléontologie.
Surtout, l'étude a fait apparaître «que la perte de fonction de ces gènes est apparue très rapidement après l’extinction des dinosaures», car «il existe par exemple des mutations communes à tous les carnivores, qui remontent donc à leur ancêtre commun» et «la datation de ces pertes de gènes permet là aussi de retrouver les résultats obtenus par l’analyse des fossiles».
Si «de nombreux mammifères sont donc rapidement passés d’un régime majoritairement insectivore à un régime dominé par la viande ou les végétaux lorsque les derniers dinosaures se sont éteints, il y a 66 millions d’années», il pourra être intéressant de se pencher sur les exceptions: par exemple, comme le pangolin, qui «mange essentiellement des fourmis et des termites», ne possède «qu’un seul gène CHIA fonctionnel», il faudra «essayer de découvrir si l’absence d’autres gènes CHIA fonctionnels chez le pangolin pourrait être compensée par une expression plus forte de ce gène, par exemple dans les glandes salivaires, ou par des bactéries du microbiome intestinal capables de dégrader la chitine».
Tags : Zoologie, 2018, Science Advances, pangolins, CHIA, évolution, insectivores, mammifères, placentaires, régime, tarsiers, oryctérope, tatous, chitinases
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