Une étude, dont les résultats intitulés «The merger that led to the formation of the Milky Way’s inner stellar halo and thick disk» sont publiés dans la revue Nature, a permis, grâce à la mission spatiale Gaia de l’ESA de dévoiler un événement majeur de l’histoire de la formation de la Voie lactée: concrètement, notre galaxie a fusionné avec une autre grande galaxie dans sa jeunesse, il y a environ 10 milliards d’années.

Rappelons tout d'abord que Gaia mesure actuellement «la position, le mouvement et la luminosité des étoiles avec une précision sans précédent». A partir «des 22 premiers mois d’observation, l’étude de sept millions d’étoiles (celles pour lesquelles les positions et vitesses 3D complètes sont disponibles)», a fait apparaître «que 30 000 d’entre elles faisaient partie d'un 'groupe étrange' d’étoiles vieilles se déplaçant à travers la Voie lactée et que l’on peut observer dans le voisinage du soleil».

Les étoiles de ce groupe, qui «nous entourent presque complètement et peuvent donc être vues à travers la plus grande partie du ciel», se distinguaient «dans les données de Gaia car elles se déplaçaient toutes sur des trajectoires allongées dans la direction opposée à la majorité des autres étoiles de la galaxie, y compris le Soleil». De plus, «le diagramme Hertzprung-Russell (qui relie luminosité et couleur des étoiles)» indique «qu’elles appartenaient à une population stellaire clairement distincte».

Des simulations ont alors indiqué que le groupe correspond à ce qu'on attend «d'étoiles qui faisaient autrefois partie d'une autre galaxie et qui ont été absorbées par la Voie lactée». Aujourd'hui, ces étoiles forment «la plus grande partie du halo interne de notre galaxie (une composante diffuse d’étoiles vieilles qui entourent à présent la majeure partie de la Voie lactée, le bulbe central, le disque mince et le disque épais)».

En outre, les simulations effectuées indiquent que «la galaxie accrétée aurait également pu perturber les étoiles préexistantes de la Voie lactée afin de contribuer à la formation du disque épais», qui «est une composante de la Voie lactée dont la structure et l’origine sont encore débattues».

Comme «les étoiles qui se forment dans différentes galaxies ont des compositions chimiques uniques qui correspondent aux conditions de la galaxie d'origine», il a été possible de confirmer grâce au relevé spectroscopique APOGEE que «ce groupe d'étoiles est bien les restes d'une galaxie qui a fusionné avec la nôtre».

Cette galaxie a été dénommée «Gaia-Enceladus du nom de l'un des géants de la mythologie grecque, qui était la progéniture de Gaia, la Terre, et d'Uranus, le Ciel» , car d'après la légende «Encelade aurait été enterré sous le mont Etna, en Sicile, et serait responsable des tremblements de terre locaux», de même que «les étoiles de Gaia-Enceladus étaient profondément enfouies dans les données de Gaia et ont ébranlé la Voie lactée, ce qui a entraîné la formation de son disque épais».

L'étude révèle aussi que «des centaines d'étoiles variables et 13 amas globulaires dans la Voie lactée qui suivent des trajectoires similaires à celles des étoiles de Gaia-Enceladus» prouvent «qu'elles faisaient partie de ce système». Comme «les amas globulaires sont des groupes pouvant aller jusqu'à des millions d'étoiles, maintenus ensemble par leur gravité mutuelle et gravitant autour du centre d'une galaxie», cette découverte démontre que Gaia-Enceladus «a dû être autrefois une grande galaxie à part entière, avec son propre entourage d’amas globulaires».

En fait, l'étude estime «que cette galaxie avait à peu près la taille de l'un des nuages de Magellan (deux galaxies satellites environ dix fois plus petites que la taille actuelle de la Voie lactée), mais, il y a dix milliards d'années, «lorsque la fusion avec Gaia-Enceladus a eu lieu, la Voie lactée elle-même étant beaucoup plus petite», de sorte que «le rapport entre les deux ressemblait davantage à quatre pour un», ce qui fait bien de cette fusion «un événement majeur pour notre galaxie».